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La présidente du Conseil départemental du Finistère défend la pêche au bar

Nathalie Sarrabezolles a interpellé par courrier le commissaire européen aux affaires maritimes et à la pêche concernant la pêche au bar, activité économique importante et hautement symbolique pour notre département. En effet, la Commission européenne envisage des mesures drastiques concernant cette espèce, ce qui pourrait impacter de plein fouet un pan de notre économie et de notre histoire.

Retrouvez-ci-dessous l’intégralité de ce courrier :

« Monsieur le Commissaire européen,

J’ai lu avec intérêt les publications de la Commission européenne relatives aux propositions des Totaux Admissibles de Captures (TAC) et quotas pour l’année 2016. Bien que le bar ne soit pas sous quota, des mesures drastiques concernant cette espèce sont proposées, avec son interdiction totale de prises du 1er  janvier au 30 juin 2016, puis sa limitation pour la pêche professionnelle comme pour la pêche récréative le reste de l’année.

Ces propositions touchent géographiquement notre département (Interdiction zone 48N) et impactent de plein fouet un pan de notre économie et de notre histoire. Département marin, le Finistère compte aujourd’hui plus de 130 bateaux de pêche qui débarquent du bar (et des dizaines de milliers de pêcheurs récréatifs). Cela représente une activité économique importante et hautement symbolique pour notre département.

Vous comprenez que le Finistère est donc concerné au premier rang par ces nouvelles dispositions qui, si elles sont appliquées, vont affecter très fortement l’ensemble des métiers et des pratiques ciblant cette espèce.

Sur notre département, la très grande majorité de ces bateaux professionnels sont des petites unités de pêche qui pratiquent les métiers de l’hameçon (lignes et palangres) et seront demain directement impactés, de  manière inattendue et probablement  définitive. En effet, interdire la pêche au bar pendant six mois leur serait fatal. Les ligneurs de bar font partie de l’ADN du Finistère comme de l’histoire de cette pêche. Comme vous le savez, cette profession a déjà opéré des démarches volontaires de mesures de gestion adaptées pour leurs  ressources, en lien avec des structures scientifiques (repos biologique, fermetures, tailles…).Il serait donc aussi paradoxal qu’injuste de les voir sacrifiés.

Les ligneurs dépendent du bar à plus de 80% et aucune possibilité de diversification ne leur est offerte : pas d’autre espèce à pêcher à la ligne et, pour la plupart, des bateaux trop petits  pour envisager une reconversion. Des centaines  d’emplois  dépendent  aujourd’hui de cette pêcherie, qui demeure encore aujourd’hui génératrice d’emplois et d’activités sur près d’une dizaine de ports du département. De jeunes entrepreneurs se lancent toujours dans cette pêche avec une approche responsable, s’endettant pour cela lourdement.

Condamnant la zone Nord, les mesures proposées frapperaient notamment de plein fouet la flottille de ligneurs emblématiques de notre territoire dans le quartier maritime d’Audierne. C’est donc toute la pêche dans les zones d’Ouessant, du raz de Sein ou de la chaussée d’Armen qui est vouée à disparaître, sacrifiant la totalité des artisans pêchant le bar à petite échelle dans ces espaces.

Ces mesures portent également le risque non négligeable de déplacer des flottilles et de  générer des pêches plus importantes sur les zones de frayères (reproductions), voire des tensions prévisibles  entre  professionnels, notamment dans le golfe de Gascogne. Diverses options et réflexions tendent d’ailleurs vers une harmonisation des réglementations pour assurer une pérennité de la pêche du bar sur toute la façade atlantique pour ne pas se retrouver dans des situations de report d’effort de pêche. Là résident aujourd’hui les problèmes et une vision collective devrait permettre de trouver des réponses pour ce secteur menacé. Nul doute qu’il faille réglementer la pêche pour préserver la ressource, mais il faut à mon sens procéder de manière à préserver les équilibres qui sont notre garantie pour une croissance verte et bleue de long terme.

Européenne convaincue, Présidente d’un Parc marin et particulièrement engagée dans les politiques de développement durable j’ai bien noté que la nouvelle Politique Commune des Pêches introduit  plusieurs  dispositions en faveur de la petite pêche, notamment dans l’article 17. Mais comprenez que des doutes et questions existent au vu d’un apparent paradoxe entre la volonté d’application de propositions pour les TAC et quotas 2016 et les orientations du FEAMP qui visent la promotion de la petite pêche côtière et la priorisation des fonds sur les activités ayant un moindre impact environnemental, cas de la petite pêche finistérienne qui est consciencieuse sur l’habitat marin, sur les autres espèces (rejet vivant) comme sur les sous-tailles.

J’espère donc fortement que les institutions européennes sauront trouver toutes les clés appropriées pour répondre à ces problématiques. Je crois en l’avenir de la pêche artisanale et en la possibilité de nos institutions de savoir s’adapter pour offrir des options justes et appropriées aux questions d’aujourd’hui et de demain. Notre devoir politique ne sera accompli que si collectivement nous réussissons à préserver à la fois nos ressources et nos emplois.

Croyant fortement que des issues favorables émergeront des discussions autour des ces problématiques actuelles et structurantes, je vous prie de bien vouloir agréer, Monsieur le Commissaire européen, l’assurance de ma très haute considération. »

Nathalie Sarrabezolles,
Présidente du Conseil départemental du Finistère