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Un Finistère solidaire et inclusif - Intervention Michaël Quernez - Séance plénière des 31/01 et 1/02

Madame la Présidente, cher.e.. collègues,

Je souhaitais intervenir également sur ce premier engagement. Ces premiers rapports, comme le souligne Marc Labbey, représentent la plus grande part de notre budget. Ils exposent surtout nos principes d’actions pour accompagner les finistériennes et les finistériens vers l’autonomie, l’émancipation, l’inclusion sociale et professionnelle.

Concrètement, le rapport 8 de cette Séance traite de notre politique d’accompagnement vers l’insertion et l’emploi. Il appelle plusieurs réflexions qui me semblent devoir être partagées aujourd’hui.

Un rappel des chiffres tout d’abord.

Le Budget alloué à la mise en œuvre de la politique d’insertion en Finistère représente environ 116M€ cette année dont 101,5M€ pour le versement du RSA et près de 15M€ pour soutenir les dispositifs d’insertion.

Si le nombre d’allocataires baisse légèrement (Le Finistère compte encore près de 17 800 allocataires), il n’y a pas de diminution cette année encore du montant de l’allocation. Cela s’explique en grande partie par la réévaluation annuelle nationale de l’allocation.

Aujourd’hui, chers collègues, les politiques d’insertion sont à la croisée des chemins.

A la croisée des chemins concernant leur financement.

Le RSA est une allocation de solidarité nationale…financée en grande partie par les Conseils départementaux. 45 millions d’euros sur un montant total de 101 millions d’euros pour ce qui nous concerne. Cette situation ne peut plus raisonnablement durer.

Il faudra donc bien que la question de la renationalisation du versement de l’allocation soit tranchée ou que des mesures compensatoires renforcées soient mises en œuvre.

Imaginez un seul instant que nous mobilisions ces 45 millions en accompagnement social et professionnel renforcé au lieu de les consacrer à l’allocation elle-même…

A la croisée des chemins surtout sur le modèle  global d’accompagnement que nous voulons et que nous devons ré-imaginer.

En juin dernier lors de la SP j’avais déjà eu l’occasion d’évoquer les débats en cours au niveau national entre acteurs et professionnels de l’insertion concernant l’avenir de ces politiques publiques.

L’Etat a depuis présenté son plan de lutte contre la pauvreté. Si le flou persiste sur bien des projets avancés, nous pouvons à ce stade partager quelques éléments du débat.

Les principales pistes d’amélioration portent sur :

  • La mobilisation plus massive des allocataires
  • La garantie d’une continuité des parcours par la désignation d’un référent de parcours pour chaque allocataire
  • Le renouvellement des pratiques de mobilisation et d’accompagnement de nos professionnels
  • Une meilleure articulation des politiques favorisant l’insertion
  • Une reprise en main de la contractualisation
  • Le développement d’une offre d’insertion plus adaptée

Ces constats, nous les partageons. Ils recoupent en effet les résultats de l’évaluation présentée l’année dernière, ici-même, sur l’accompagnement des BRSA en orientation sociale.

Nous n’avons donc pas attendu les résultats des missions diligentées et du Gouvernement pour avancer très concrètement sur ces chantiers.

Mais si nous partageons pour partie les constats il me semble que nous divergions pour partie sur les inflexions et réajustements nécessaires pour que nos politiques publiques d’accompagnements soient plus efficaces.

Que propose ou va certainement proposer le Gouvernement dans les semaines et mois à venir ?

Pour provoquer ce qu’il appelle un « choc » de mobilisation des acteurs sur les politiques d’insertion, l’Etat envisage en effet plusieurs pistes qu’il a pour partie d’ailleurs d’ores et déjà initiées :

  • Une contractualisation renouvelée entre l’Etat et les Départements sur les politiques d’insertion. Cette contractualisation prévoit des indicateurs de moyens et de résultats permettant de bonifier les compensations de l’Etat. Une enveloppe bonus de 250 M€ est annoncée au niveau national, pour 100 Départements. C’est minime. Précisons que le bonus pourrait devenir un malus sur le calcul du FMDI pour les Départements qui n’atteindraient pas des objectifs en termes de mobilisation des publics ; trois Départements Le Bas-Rhin, le Nord et le Pas-de-Calais ont signé ces contrats issus comme vous le savez de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.
  • La création d’un service public de l’insertion dont l’Etat serait le garant. Les contours de ce service public de l’insertion ne sont pas encore définis. Frédéric Bierry (Président du CD du Bas-Rhin et de la Commission Affaires Sociales de l’ADF) s’est vu confier une mission relative au processus de contractualisation Etat/Départements et aux prémices de la préfiguration du service public de l’insertion. Un échange a été organisé le 8 janvier dernier par l’Assemblée des Départements de France, en présence de bon nombre de Départements.
  • La création du revenu universel d’activité qui serait expérimenté à compter de . Les contours n’en sont pas fixés mais nous pouvons déduire des premiers échanges, une inversion de la la logique d’attribution de l’allocation. Ce revenu serait déclenché à partir du moment où la personne est en processus d’accompagnement. Nous ne pouvons encore que supposer ce schéma dans la mesure où l’Etat communique peu sur ce nouveau dispositif.

Que pourrions-nous proposer en réponse ?

  • Une véritable décentralisation des politiques publiques d’insertion: Le Département est le chef de file des politiques d’insertion. Toutefois, la décentralisation n’a pas été menée à son terme sur les politiques d’insertion par l’activité économique. En effet, l’organisation de l’offre de places en chantiers et d’entreprises d’insertion continue à relever des compétences de l’Etat (DIRECCTE) privant les Départements d’un levier d’organisation de l’offre et de la nature des supports d’activité proposés.
  • Nous avons par exemples des difficultés à faire aboutir des projets portant validés par les instances d’agrément de l’insertion. Citons les projets du SMATAH, de Don Bosco (Ty Jouets), et surtout du chantier d’insertion que le Département souhaite porter. Il semble indispensable de passer à une nouvelle étape de la décentralisation et d’ouvrir la possibilité pour les Départements d’une prise de compétence sur l’organisation de l’offre d’IAE afin qu’elle soit pilotée par les territoires et reliée à la connaissance que nous avons des publics et des besoins économiques de nos bassins d’emploi.

Par ailleurs des mesures de simplification du dispositif IAE semblent incontournables. La procédure d’’agrément des places semble aujourd’hui obsolète et n’offre pas l’agilité suffisante pour adapter rapidement l’offre aux évolutions des territoires et de l’économie locale. De la même façon, l’entrée dans un chantier d’insertion suppose un agrément à obtenir pour chaque bénéficiaire, agrément délivré par Pôle emploi. Cette procédure multiplie les étapes administratives pour les personnes, retarde les entrées dans les structures et mobilise inutilement du temps administratif à Pôle emploi et dans les services des Départements. Il semblerait intéressant de remonter ces propositions à l’Etat pour que la contractualisation sur les politiques d’insertion ouvre cette possible prise de compétence renforcée pour les Départements.

  • La construction d’une gouvernance renforcée des politiques d’insertion, de formation, d’emploi à l’échelle régionale.

 Dans un souci de préserver des capacités d’initiative locale, et de favoriser les démarches de différenciation et d’expérimentation, 7 grandes collectivités, La Région, les quatre Départements, les deux Métropoles ont identifié des travaux de court terme dont la mise en œuvre d’un service public sans rupture pour les demandeurs d’emploi fragiles. Trois séances de travail entre sept collectivités ont été animées entre octobre et décembre 2018. Pôle emploi a également été associé à ces travaux régionaux.

Ces questions ont d’ailleurs été mises à l’ordre du jour de la Conférence Sociale qui s’est tenue en milieu de semaine dernière à Rennes. Avec pour priorité : le repérage et l’orientation des publics, l’amélioration des accompagnements proposés, une gouvernance bretonne pour un service public de l’insertion, de l’emploi et de la formation.

S’il reste du chemin à faire nous devons poursuivre ce travail.

Nous défendons ici une approche territorialisée, la mise en œuvre effective d’un droit à la différenciation, loin d’un schéma recentré piloté par les seuls services de l’Etat et éloigné des réalités bretonnes et finistériennes.

Je crois en la force des territoires pour imaginer les réponses adaptées aux besoins des habitants et peu aux logiques de recentralisation.

  • Le Gouvernement annonce la création d’un Revenu universel d’activité qui doit à terme remplacer le RSA. Nous pourrions proposer l’expérimentation du revenu de base.

 Je vous invite à lire les premiers éléments fournis par le Gouvernement pour construire ce RUA. Ce revenu universel d’activité inverse la logique d’attribution de l’allocation et ne serait déclenché qu’à partir du moment où la personne serait en processus d’accompagnement.

Comprenons-nous bien : notre objectif est bien le retour à l’emploi de toutes, et tous. Mais n’oublions pas que le RSA bénéficie aussi et en grande partie à des personnes qui notamment du fait de l’absence d’emplois disponibles, ne peuvent pas travailler.

« Et si personne n’est inemployable », la levée des freins peut supposer qu’à un moment de vie, une personne ne puisse être employée. Une allocation de solidarité « non conditionnée » est alors nécessaire sauf à nourrir la très grande pauvreté.

Certes il y a des métiers en tensions et l’enjeu est bien de permettre à tous d’y accéder. Mais c’est sans rapport avec le nombre de personnes sans emploi en Finistère.

Supprimer ce dernier filet de sécurité qu’est le RSA dans sa forme actuelle, ne peut concourir à mon sens à la suppression de la pauvreté ce qui est le but recherché.

La question est de savoir si le revenu de base peut ou non remobiliser plus efficacement les allocataires du RSA.

La mise en œuvre des préconisations de l’évaluation interne.

Un gros travail est mené depuis de nombreux mois déjà autour de la refonte de l’organisation du RSA, de sa gestion administrative à la suite du rapport sur l’accompagnement des BRSA de juin 2018 que je citais tout à l’heure.

Il s’agira notamment d’expérimenter des plateformes d’amorçage de parcours, de finaliser la réorganisation des équipes pluridisciplinaires, de remobiliser les professionnels sur la contractualisation,  de retravailler le rôle du professionnel référent de parcours…

Nous devons être très vigilants : les délais de mise en parcours et de contractualisation ne sont pas atteints actuellement. Ce sont les enjeux de ce semestre.

Cela doit permettre à nos travailleurs sociaux d’être davantage détachés de la gestion administrative pour se concentrer sur l’accompagnement des  bénéficiaires dans leur parcours.

Les objectifs sont aisés à résumer : faire plus simplement pour raccourcir les délais de mises en parcours.

Il faut que dans le mois chaque nouvel allocataire soit rencontré pour poser un parcours d’insertion sociale ou professionnel et décliner un contrat d’insertion.

Ouvrir des expérimentations de renouvellement des accompagnements en s’appuyant sur des « cohortes témoins ».

Il semble incontournable de mener des expérimentations en s’appuyant sur de nouveaux concepts d’approche des usagers.

La réponse envisagée à l’appel à projet 100% inclusion initiée par l’Etat doit nous permettre de modéliser et tester une nouvelle organisation du dispositif RSA.

Marie Gueye évoquera je pense dans quelques minutes la refonte des Commission locale de lutte contre les exclusions et préciser les contours de la réflexion relative à un nouveau référentiel du RSA  qui vise à mieux définir les missions des professionnels du Conseil départemental et partenaires.

Et les dispositifs que nous allons réformés et initiés au cœur des territoires en déclinaison de notre Plan départemental d’insertion et se déclinaisons territoriales.

J’ai débuté mes propos en évoquant les aspects financiers. Permettez-moi de le conclure en évoquant mes inquiétudes relatives à l’avenir du FSE.

Les discussions sont en cours porterait sur une recentralisation de la gestion du FSE avec la création du 5 agences nationales. Quand l’on connait les difficultés et les lenteurs de l’ASP pour verser les sommes, nous pouvons avoir quelques inquiétudes…

Il est aussi question d’une régionalisation complète du FSE. Les débats se poursuivent. En tout état de cause je suis plus que favorable de mon côté au maintien du Département comme Organisme intermédiaire pour flécher les crédits au plus près des besoins des territoires.

Enfin  et j’en termine la, mission départementale de prévention et de lutte contre la pauvreté permettra également d’ouvrir de nouvelles réflexions  pour lutter contre la grande pauvreté. Ces réflexions pourront être intégrées dans le PDI via des dispositifs opérationnels.